Fanny a 28 ans, elle habite à Bruxelles et écrit des blagues.
(février 2022)

Il y a deux ans j’avais fait une chronique qui s’appelait « vivre seule », c’était avec Alain Chabat.

A ce moment-là c’était la première fois que j’aménageais vraiment seule.
En fait c’est pas tout à fait vrai dans le sens où quand je suis arrivée à l'UNIF à Bruxelles, j’avais un petit une pièce seule. Mais je considérais ça plutôt comme un truc étudiant où on était plusieurs dans le bâtiment donc c’était assez différent. Et puis j’étais tellement focus sur mes études que ça me prenait tout mon temps.

Mais là il y a deux ans c’était la première fois que j’emménageais seule en tant qu’adulte.
J’avais plus le choix d’avoir mon endroit que je pouvais décorer comme je voulais parce que je gagnais de l’argent avec un travail qui est ma foi assez… où tu peux vite te sentir seule quand tu fais un truc artistique. Il y a des hauts très hauts, des bas très bas, des shots d’endorphine à des moments et d’autres où c’est vide.

C’est la première fois que j’emménageais seule dans ce contexte là et il se trouve que c’est tombé pile un mois avant la pandémie. Donc là je l’ai bien senti que je vivais seule.
C’était long, c’était très très long.

En fait comme tout le monde j’avais une envie et un besoin d’être seule, posée chez moi et quand le confinement est arrivé on a fait « oh putain, en fait c’est pas si chouette ». Mais c’est comme dans tout, c’est une question d’équilibre. Et encore maintenant je me suis dit il y a un mois « je voudrais avoir le covid en fait ». Je veux pouvoir m’arrêter pendant une semaine, rester chez moi et juste ne pas avoir besoin de travailler parce que j’ai une excuse qui est « j’ai le covid ».

Je trouve que ça a changé énormément de choses ça. Le fait de savoir que c’est possible qu’un facteur extérieur paralyse le monde entier et qu’on soit obligé de rester chez nous c’est chaud parce que maintenant on a un peu toujours ce truc en tête de « ça pourrait recommencer ». Et un peu cette envie que ça recommence en fait.
Parce qu’évidemment quand on est pas dans une situation on a envie d’avoir l’autre. Quand on est enfermé chez nous on a envie de sortir et dès qu’on sort on a envie de pouvoir être en pause.

Je pense qu’on part très souvent du principe que les gens sont seuls pas par choix. Alors que parfois c’est un choix, parfois pas. Mais ça dépend. En effet je pense que les gens te regardent un peu bizarre si tu leur dis « je viens de dîner seule au resto ».

Moi c’est un truc que j’aime bien. Souvent je prends mon carnet là-bas et j’écris des idées pour des chroniques ou pour des trucs. Ou juste je marque comment je me sens pour voir s’il y a une évolution, s’il y a des paternes. Et je trouve que ces moments-là sont cool parce que c’est un peu un moment où tu te poses et t’es obligé d’être assis et de rien faire. Et ça me manque vachement, c’est plus quelque chose que je fais souvent, prendre du temps pour ne rien faire. Et donc là j’aime assez bien ça.

Je pense qu’on juge souvent les gens seuls parce qu’on projette la tristesse que nous on pourrait ressentir si on était seuls. Je pense que dans tout, comme quand dans des cas très pratiques, tu croises quelqu’un seul au resto ou dans les cas de quelqu’un qui n’est pas dans une relation classique avec une autre personne tu te dis « ah ben elle cherche ». Mais non peut être qu’elle n’a pas envie de chercher, peut être que ça lui va très bien d’être seule et c’est dans ces moments-là que tu te construis le plus peut être. Et parfois les gens ont besoin de ça. Mais je pense qu’on projette l’angoisse que ça nous ferait à nous.

On s’attend à ce que ce soit provisoire alors que ça peut être une fin en soi.

C’est jamais une fin en soi d’être seul.

Dans le personnage que je construis dans mon travail, je parais très introvertie et solitaire. En fait ça dépend. Déjà j’ai beaucoup évolué depuis que j’ai commencé à faire du stand-up et des chroniques.
C’est vrai que j’étais très introvertie. Maintenant moins puisque je suis un peu validée par mon travail, je me suis un peu plus trouvée dans ce que je fais, ce que j’aime faire et tout. Je suis plus à l’aise avec le fait d’oser exister donc je le suis vachement moins qu’avant.

Maintenant, ça dépend très fort. J’ai vraiment des cycles où je vais être très extravertie, à être à l’aise, je découvre des nouvelles personnes, tiens je vais aller parler comme si des blagues machins. Et puis d’autres fois je vais être dans des phases un peu plus sombre où je vais tout sur-analyser en permanence et là je vais être incapable d’avoir des conversations fluides avec des gens parce que je vais un peu être en stress tout le temps à psychoter sur des trucs. Mais je dirais que dans les chroniques je dois toujours de toute façon grossir le trait parce que le but c’est d’être un peu caricaturale et un peu marrant.

Donc je le suis moins dans la vraie vie mais ça dépend, c’est assez cyclique.

Je pense que le fait de ne pas avoir un appartement à soi ce n’est pas propice à la création plutôt que l’inverse.

Quand tu vis avec quelqu’un tu es vite avalé par la vie, les trucs de tous les jours, ah la personne a envie de faire ça, elle rentre du boulot elle te raconte sa journée. C’est extrêmement chronophage, même si c’est très chouette.
Maintenant, quand tu es seule, tu es vraiment seule avec tes pensées h24 donc forcément ça te pousse beaucoup plus à développer quelque chose sur la durée sans être interrompu, que ce soit dans le processus de réflexion ou celui d’écriture et de création.

Moi je me rends bien compte que quand j’habite seule vs quand je n’habite pas seule il y a beaucoup de choses qui changent au niveau de l’humeur évidemment.
Je suis beaucoup plus souvent triste… Tu vois tu es toute seule avec tes pensées tu t’énerves tu repasses les mêmes trucs en boucle. Tu es un peu drama comme ça quand t’es seule parce que tu n’as pas de ping-pong intellectuel avec des gens. Mais c’est là que tu te retrouves seule face à ta feuille et tu n’as pas d’autre choix que faire ça parce qu’il faut avancer, il faut faire un truc.

Là où quand tu es avec quelqu’un je pense qu’il y a quelque chose de plus joyeux, plus doux. Donc c’est plus facile de vivre mais pour créer c’est compliqué de trouver du temps. Parce que des fois tu n’oses pas dire à la personne « faut que j’avance » mais des fois juste tu n’as pas envie en fait. Tu dis « ouais je pourrais créer un truc » mais peut être que je pourrais juste être avec cette personne et tout serait doux, pas douloureux et ce serait trop chouette.
Et c’est compliqué parce que parfois tu as juste plus envie de créer quand tu es avec quelqu’un avec qui ça se passe bien.
C’est compliqué de trouver un équilibre entre se sentir bien, être avec quelqu’un ou ce truc d’artiste maudit tout seul qui compose, qui fait des pages et des pages.

J’arrive pas trop à le gérer.
Moi je sais que je travaille bien que en aillant des deadlines et en ayant des échéances très précises. J’ai besoin d’être dos au mur pour avancer parce que sinon justement je fais tout sauf bosser ou alors je mets mille heures pour un truc qui en aurait demandé 3. Juste parce que je remets toujours à plus tard et que je ne suis jamais concentrée.

Je ne sais pas gérer ce truc de quand je suis triste je suis trop triste pour bosser et quand je ne suis pas assez triste je me dis « mais je n’ai rien à dire ». Et c’est compliqué de trouver un entre-deux là-dedans.

En fait de base mon ancien appart c’était un endroit provisoire parce que je venais juste de me séparer du garçon avec qui j’étais donc je voulais juste un endroit où aller vite. On s’entendait toujours très bien donc je pouvais rester là un petit peu mais je voulais qu’il y ait une cassure. Et donc c’était un bail d’un an et je m’étais dit « Ok c’est provisoire je ne vais pas trop m’installer. »

Donc pendant 7 ou 8 mois il y a eu quasiment rien comme meubles, rien comme déco, il n’y avait pas de photos, pas de cadres, … Je n’ai pas eu de table basse pendant 8 mois, du coup j’avais juste un canapé avec rien devant et moi je trouvais ça assez marrant.
Mais du coup il y avait vraiment un truc de « c’est provisoire, je ne vais pas m’attacher à ce lieu… »

Et en fait vu qu’il y a eu le confinement j’ai passé vraiment beaucoup de temps là-dedans. Et au bout de huit mois j’ai demandé à ma proprio « est-ce que vous allez faire les travaux que vous aviez prévus cette année-ci ou vu qu’il y a le confinement vous ne les faites pas ? » Et elle m’a dit « si tu veux tu peux rester un an de plus ».
Du coup à ce moment-là j’ai commencé à un peu aménager, acheter des trucs, à mettre de la déco et tout. Mais jusqu’à huit mois je ne me sentais pas vraiment chez moi. C’était vraiment un lieu où je restais en attendant. Un truc très impersonnel.
D’un côté ça me plaît et d’un autre je pense que chez moi, c’est très imprégné de qui je suis. La bibliothèque j’aime bien que ce soit un grand truc coloré. Mais là il y avait un truc très froid. Que des murs blancs, des trucs en bois et c’est tout.

Au début j’avais du mal à comprendre pourquoi ça ne passait pas et puis ma psy m’a dit « mais… tu l’as aménagé ? » j’ai dit « bah non ». « Bah euh voilà, il faut pas chercher loin ». Juste réfléchie aha.

Et c’est là que j’ai commencé à me dire « ah ouais c’est chez moi ». Même si ça va durer qu’un an, un an et demi… C’est chez moi et faut pas que j’ai peur de faire des trous dans les murs.

Donc là j’ai commencé à acheter des trucs et en effet ça a été un peu mieux, c’était plus chaleureux. C’est un appart qui avait ses défauts, dont je n’ai pas entièrement profité mais c’était un chouette endroit quand même où j’ai été très triste mais où j’ai été bien aussi. Vu que c’était le confinement au début, beaucoup de solitude. Et puis j’ai quand même fait des choses chouettes, j’ai rencontré des chouettes personnes, créé des chouettes projets là-dedans.
Au fur et à mesure il a pris un peu de vie.

Le nouveau c’était fou parce que là je l’ai acheté.
Alalah mais quelle folie !

C’est un truc que j’avais envie de faire acheter un appart parce que j’ai 27ans et que je me disais « quand même ce serait bien de ne pas mettre son loyer dans la poche de quelqu’un d’autre trop longtemps ». Et puis j’avais envie d’avoir un lieu à moi.

Mais ça a pris du temps. Parce qu’au début j’ai un peu essayé moi-même et j’ai eu de mauvaises expériences. C’est absolument terrorisant de faire ça, tu prends un prêt sur 25 ans, c’est un truc où tu dois être sûr de toi, c’est horrible quoi !

J’ai fini par m’entourer, j’ai fait appel à quelqu’un dont c’est le métier de chercher des apparts, de gérer tous les travaux.

Là j’ai pu profiter des choses positives ; être hyper galvanisée d’avoir un lieu à toi, en ayant moins l’angoisse de « est ce que je fais le bon choix ? Est-ce que j’ai pensé à tout vérifier ? Est-ce que je suis pas en train de me faire entuber ? ». Et donc là c’était plutôt elle qui gérait les problèmes et moi le positif, c’était trop bien. Et là j’ai enfin pu avoir moins peur et me lancer. Bon ça reste absolument terrorisant surtout qu’il était moche de base. J’ai fait deux mois de travaux.

Je voyais le potentiel, je me disais : « ok, il y a pas grand-chose qu’un beau parquet ne puisse résoudre. » Et puis c’était assez lumineux, avec assez d’espace, il y avait un grand bureau où je pouvais travailler. Moi mes seuls impératifs pour un appart c’était la lumière, une grande bibliothèque, du parquet et des murs blancs.
Le reste, je peux gérer.

Là j’ai emménagé dans cet appart début décembre et ma copine a emménagé un mois et demi après.
De base je lui avais dit dès le début de la relation « je ne veux pas qu’on habite ensemble » mais bon finalement…

Après c’est vrai que j’ai besoin d’espace, de moments seuls et tout.
Mais au final elle était tout le temps chez moi. Du coup à un moment on s’est dit qu’on allait regarder les choses en face. C’est juste chiant de devoir aller chez toi de temps en temps pour tchecker machin.
Du coup on s’est dit que voilà, quitte à être tout le temps ensemble autant l’être vraiment.

Elle a aménagé et de nouveau c’est terrorisant. Surtout pour elle, moi ça va, je suis étrangement chill.

C’est forcément plus flippant pour elle d’arriver dans un endroit nouveau et d’avoir l’impression de s’imposer. Dès qu’elle amène des caisses elle est en mode « je suis désolée d’avoir des choses », je suis comme « mais meuf, quoi ?! »

On s’est dit que c’était temporaire, pendant un an le temps qu’elle achète un appart. Comme ça on aura une porte de secours si une de nous deux se dit « non mais en fait ça va pas». Pour éviter de se dégoutter en habitant ensemble, là on a une porte de secours.

C’est un truc hyper important pour moi d’avoir des portes de secours.

Quand j’ai emménagé avec mon ancien copain on s’est dit « ok on peut emménager ensemble mais à une condition, c’est qu’il y ait une pièce où on peut aller dormir si on a pas envie de dormir ensemble.
Même si on s’est pas engueulé, mais juste envie d’être seul.

Je savais déjà que j’avais beaucoup besoin de zoner seule à rien faire ou à lire ou sans que personne me saoule.
Mais là ça m’a appris que j’aimais moins la solitude que ce que je pensais.

Le fait que ça ait été forcé à cause du confinement. Des fois j’étais juste en bad et j’étais seule et je me disais « ah putain c’était quand même vachement cool d’avoir des gens avec qui tu peux juste « être ». Sans nécessairement parler ou quoi mais juste être. »

En fait j’aimais que ce soit un choix et là c’était plus un choix. Là c’était vraiment moi qui étais seule et qui ruminait dans mon coin. Je me sentais pas bien mais j’osais pas appeler des potes parce que je me disais que j’allais être un fardeau et du coup je tournais en rond en écoutant Juliette Armanet.

Ça m’a fait prendre un chat aussi.
J’en voulais un depuis longtemps mais je me disais « non, ça va salir et tout » et j’aime bien que ce soit propre.
Et puis au bout de 4 mois de confinements je me suis dit « tu sais quoi, tant pis. Ce sera un peu plus sale mais au moins il y aura un truc vivant dans ma maison.

Et donc Timothée est arrivé.

Eh oui, très bonne idée ! Très bonne idée de faire dépendre sa santé mentale d’un animal, de projeter ses angoisses sur lui. Oui, oui, oui.
Mais ça te donne de quoi t’occuper, tu sens moins inutile.
Le matin tu te lèves, tiens le chat il va dans ton lit, le soir tu tcheckes si tout est ok pour lui. Ça te donne une obligation pour te lever le matin. Bon c’est pas non plus un chien mais c’est un bon entre deux, entre un bonsaï et un chien.

Mon rapport au travail en vivant avec ma copine c’est assez compliqué à dire pour le moment parce que là je suis en tournée du coup mon rythme est très saccadé. Genre je vais partir pendant 3 jours, puis je vais revenir 4 jours, les deux premiers je serais HS, il y en a un autre où j’aurais des rendez-vous à gauche à droite. Donc c’est assez peu représentatif des vraies bonnes journées angoissantes que j’aurais en avril mai juin quand là je serais juste à la maison.

Elle, si elle est en télé-travail on va juste bosser à deux et ça va être… Voilà j’appréhende un peu ça, ce moment où on sera trop tout le temps à la maison toutes les deux parce que je pense que c’est jamais bon d’être trop ensemble, sinon on a plus rien à se raconter.

Sinon je dirais que pour l’instant ça se passe assez bien. C’est chouette, on a quand vachement toutes les deux une vie à côté. Elle va faire du sport, voir des potes, elle recommence à bosser au bureau. Donc il y a plein de moments quand même où on vit des choses pas ensembles et on a des trucs à se raconter.

Et puis on est pas tout le temps l’une sur l’autre. On peut être seules. On peut être seules à deux aussi des fois. Et puis elle arrive à bosser ici quand même du coup le bureau comme il est très grand on a pu mettre toute une ligne de table pour bosser toutes les deux sans soucis.

Moi j’ai encore un peu de mal à vraiment écrire, parce que ça je pense que c’est un truc où tu dois être seule vraiment. Mais vu que je suis en tournée, c’est pas encore un problème. Je peux me permettre de ne pas être concentrée à fond, pour l’instant.

Sinon je vais beaucoup bosser dans des cafés aussi. Je trouve ça cool de changer d’environnement assez régulièrement comme ça tu tombes pas dans tes vieux réflexes où en fait tu vas dans un café mais juste pour ne rien faire ailleurs. Je suis une professionnelle de ça.

Moi quand je vais dans un endroit spécifiquement pour faire un truc, je le fais pas. La seule fois où j’ai réussi, je suis partie deux jours à Ostende, grosse ambiance. Je laissais mon téléphone à l’hôtel et en fait le changement de langue, tu te sens quand même vachement plus dans un autre pays. C’est en Flandre, à une heure de train de Bruxelles mais du coup les gens ils parlent flamand. Tu as l’impression d’être un peu en ermite dans un autre pays alors que tu es à Ostende quoi. Ça peut être je ferais…. Je sais pas encore.

J’aime pas inviter des gens chez moi.
En fait ça dépend.

Quand je suis ivre oui j’ai tendance à le faire et je déteste ça. C’est horrible parce qu’il y a ce délai entre le moment où tu invites et le moment où ils arrivent et entre les deux tu as changé d’avis. T’es comme « oh putain dégagez ».
Surtout que j’aime pas que les gens en soirée quand ils sont un peu soûls ils renversent des trucs sur la table, ils mettent pas de sous verre… J’ai envie de les taper.

Et j’ai très vite envie d’aller dormir du coup d’une minute à l’autre je peux switcher et me dire « non c’est bon j’ai fini ». Et je vais me brosser les dents pour qu’ils comprennent.

C’est horrible, je suis vraiment une merde.
Ou sinon il m’est déjà arrivé d’aller dormir sans rien dire à personne, donc les gens ils font leur vie et voilà.
Mais ouais, quand j’ai envie d’aller dormir il y a rien qui peut se mettre sur mon chemin.

Mais d’un côté il y a ça, de l’autre je trouve que maintenant que j’ai un endroit qui me plaît et tout je trouve ça cool d’y faire venir des gens que j’aime bien.
Pour l’instant comme ça fait seulement un mois et demi que je suis là et que je suis pas souvent chez moi j’ai pas encore de juste milieu par rapport à ça. Mais je sais qu’en général je suis pas trop du genre à inviter des gens chez moi.

Et puis il y a inviter des gens genre c’est 1h, 1h et demie whatever et inviter les gens vraiment ils entrent dans ton intimité, ils vont dans tes armoires, ils dorment chez toi…

Je pense que tout le monde peut aimer avoir des moments seuls. C’est juste qu’en fonction de à quel point tu en as besoin et pour quelles raisons tu en as besoin… En fait quand tu es introverti tu te recharges en étant seul et ton énergie tu la dépenses quand tu es avec les autres et quand tu es extraverti c’est l’inverse.

Je pense que moi j’ai besoin de me recharger toute seule et j’ai un quota de relations sociales et quand il est épuisé mais faut même pas me parler quoi. Et je deviens désagréable et tout…

J’ai pas mal ça. Du coup partir en vacances avec des gens c’est une angoisse. Parce qu’en vacances on est un peu tout le temps ensemble en groupe. Et moi je sais que non hein, je vais être contente de rentrer.
En général en vacances je suis plus contente de rentrer que d’y aller parce déjà c’est être loin de chez moi et j’aime bien mon petit confort, mes habitudes et tout.

Et puis parce qu’il faut être avec des gens tout le temps et ça moi c’est un truc qui m’angoisse de ouf.

C’est vrai que j’aime bien avoir des moments où juste je lis et c’est super de lire avec quelqu’un, moi j’adore ça. Mais des fois les gens ils parlent. Mais mazette mais qu’est-ce que tu fais, non hein, c’est pas le principe.

Ma copine elle lit tout haut les livres. C’est horrible. Enfin non c’est très marrant. En fait elle y arrive à lire dans sa tête mais souvent, réflexe, elle lit tout haut. Surtout quand c’est en anglais. C’est trop chelou. Des fois elle fait ça dans le train c’est une psychopathe.

Je ne sais pas si il y a quelque chose de politique dans le fait de vivre seule mais en tout cas oui ça dit quelque chose. J’ai réalisé il y a pas longtemps que en Belgique, je sais pas si c’est ça en France, tu ne peux pas être marié avec quelqu’un sans être domicilié au même endroit.
Et je trouve ça fout. Parce que moi dans ma relation idéale, même si je veux pas me marier non plus, c’est deux personnes qui ont un appartement mitoyen mais qui ne vivent pas ensemble. Comme ça tu as le plaisir de retrouver l’autre et tu as des moments seule.

Le fait de ne pas habiter ensemble je trouve ça fantastique et je trouve que ça garde une fraîcheur. Mais c’est assez mal vu de pas vouloir suivre le chemin de tu te maries, tu habites ensemble, tu achète une maison, tu as un golden… Je sais pas si c’est politique, j’ai l’impression que c’est de plus en plus normalisé.

Maintenant je sais pas si c’est parce qu’on est dans des bulles de gens un peu woke qui lisent Mona Chollet. Vu que je fréquente que des gens qui me ressemblent je sais pas comment c’est dans d’autres milieux mais quand je vois ma famille, ma cousine et tout ce sont des schémas très classiques, tout le monde a des enfants, se marie assez vite ou a envie de se marier en tout cas. Tout le monde suit ce truc là et je pense pas que ça leur viendrait à l’esprit.

D’ailleurs c’est une question qui revient souvent : « Est-ce que tu as quelqu’un ? » « Quand est-ce que tu te maries ? » « Est-ce que tu veux des enfants ? ». Alors que moi c’est vraiment pas une question que j’aurais tendance à me poser.
En fait j’aurais tendance à me poser la question dans l’autre sens : « Est-ce que sur ta vie tu veux rajouter un mariage ? » Plutôt que « Pourquoi tu es pas encore mariée ? » Le truc ça doit être quelque chose que tu veux. C’est pas du tout une évidence dans ma tête et c’est un truc j’ai vraiment du mal à comprendre le but.
Moi ça va, je vois pas énormément ma famille.
Maintenant je vois bien que ma mère ça lui fait trop plaisir que là je sois avec quelqu’un, qu’on emménage ensemble, elle serait trop contente si je me mariais, si j’avais des enfants, genre elle veut trop avoir des petits enfants.

Mais ça va elle est pas oppressante, elle sait que moi c’est pas mon délire et elle est très ok avec ça.

Après c’est le genre de truc que tu vas quand même pas crier haut et fort que tu veux pas d’enfants et que tu veux pas te marier sinon tu sais que les gens vont te poser plein de questions et te demander
« Mais pourquoi ? C’est juste que tu te rend pas encore compte. »

« Eh frère, chut. Ça va. »